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L’un des articles du numéro de décembre 2018 de la revue du FMI Finances et développement s’intitule « Atelier de crise ». Il présente les travaux de l’atelier de l’université Yale, qui chaque année organise un partage d’informations avec les banquiers et financiers ayant dû affronter des crises financières mondiales, notamment celle du peso mexicain de 1994, la crise asiatique de 1997, et enfin la crise financière mondiale de 2008.
Depuis plusieurs années, ce blog porte le message de s’intéresser à l’histoire des crises de quelque nature qu’elles soient et plus particulièrement aux enseignements apportés par les crises économiques mais également par les théories économiques comportementales.
Premier enseignement délivré par les vétérans des crises économiques : Ne pas compter sur un mode d’emploi.
Le corpus de connaissances et de retours d’expériences est abondant mais peu utilisé. Cela tient au fait que l’analyse collective est défaillante en raison des biais cognitifs qui rendent souvent les décideurs aveugles et sourds.
Second enseignement, il n’existe pas encore de passerelles solides entre l’enseignement universitaire, les institutions économiques et les législations et réglementations votées ou décidées par les gouvernements. Cela vaut pour les crises financières comme pour toutes les autres crises systémiques.
L’ambition de Yale est d’aboutir à un manuel de riposte aux crises, baptisé Projet Bagehot, du nom de Walter Bagehot, journaliste et économiste britannique du 19éme siècle et auteur de « Lombard Street ou le marché financier en Angleterre ».
Ce programme de recherche s’attache à analyser simultanément des crises et les mesures gouvernementales prises en réponse en décortiquant les détails techniques de ces interventions.
Cet article de la revue du FMI a été l’occasion de relire Lombard Street paru en 1873 et traduit en français dès 1874. Sa dissection des rouages d’une panique financière en s’appuyant sur les crises de la Banque d’Angleterre en 1857 et 1866 est très intéressante et transposable à tous les autres types de grandes crises.
Il pose ainsi la question du temps long, trop souvent éludé, et qui, si cette donnée était prise en compte permettrait de mieux traiter les prélèvements et les redistributions entre les périodes fastes et les récessions. Il décortique les crises financières anglaises de 1825 et 1866 avec la découverte comme explication de ces crises que : les jetons qui servaient à marquer les points au jeu, c’est-à-dire que les actions des compagnies créées pour soutenir la fièvre, n’ont aucune espèce de valeur ; elles disparaissent toutes, mais une grande partie du crédit disparaît avec elles….
Leçon à méditer dans notre siècle ou le virtuel est monétisé à outrance….
Bagehot nous dit aussi que « Les gens sont d’autant plus crédules qu’ils sont plus heureux ; quand on vient de gagner beaucoup d’argent, quand on est persuadé qu’on va en gagner beaucoup encore, on se laisse bien facilement duper »
Autre enseignement de bon sens mais trop souvent perdu de vue de nos jours : la confiance.
Pour avoir confiance dans les institutions que sont les banques, les entreprises et les États, il faut que les clients et les citoyens éprouvent de la confiance envers les hommes.
Bagehot parle de « confiance d’homme à homme » et, nous dit-il « quand des causes cachées affaiblissent beaucoup cette confiance, un petit accident peut lui porter un coup terrible, et un grand accident l’anéantir presque pendant un instant ».
En savoir plus :
Finances et développement, la revue du FMI
https://www.imf.org/external/pubs/ft/fandd/fre/2018/12/index.htm
Lire Lombard Street sur le site de l’université du Québec à Chicoutimi.
http://classiques.uqac.ca/classiques/bagehot_walter/lombard_street/lombard_street.pdf